Se préparer pour le 19 mars... et pour la suite indispensable « On va s'en sortir », vient d'assurer la présidente du Medef Laurence Parisot en parlant de la crise. Mais, qui est ce « on » ? S'il s'agit du patronat, elle a toutes les raisons d'être optimiste. L'État fait tout ce qu'il faut pour cela. Mais quels sont les travailleurs qui pourraient partager cet optimisme ? Sûrement pas ceux qui sont déjà mis à la porte de leur entreprise et qui, en perdant leur salaire, ont perdu leur unique moyen d'existence. Pas plus ceux qui sont menacés de licenciement, la quasi-totalité des salariés !
Les grands patrons ont des raisons d'être optimistes. Ceux des plus grandes entreprises en premier lieu, celles du CAC 40. Avec 95 milliards de profit, 2008 a été, malgré la crise, une bonne année. Pour beaucoup d'entre elles, non seulement la crise n'est pas une catastrophe, mais c'est une opportunité d'absorber d'autres entreprises plus vulnérables.
Quant aux autres, les banques qui sont en difficulté du fait de leurs propres spéculations, ou l'automobile, du fait que son marché s'écroule car les consommateurs des classes populaires n'ont pas de quoi se payer un véhicule, elles n'ont pas à s'en faire. Elles n'ont même pas à tendre la sébile pour que l'État vienne à leur rescousse.
Mais que les grandes entreprises s'en sortent malgré la crise ne signifie certainement pas que leurs travailleurs s'en sortent. C'est même l'inverse. Pour permettre aux grandes entreprises de s'en sortir, le grand patronat et le gouvernement sont en parfait accord pour prendre sur les classes populaires. Les aides de l'État aux entreprises sont accordées au détriment d'autres postes du budget. Plus d'argent pour les entreprises, c'est nécessairement moins d'argent pour les hôpitaux, pour les écoles, pour les transports, pour la protection sociale, pour les services publics utiles à tous.
Et en quoi les travailleurs devraient-ils se réjouir qu'une entreprise garde ses profits, si c'est en diminuant la masse salariale par le blocage des salaires, la diminution de ses effectifs ou le chômage partiel ?
La présidente du Medef ne sait pas plus que quiconque quelle sera l'évolution ultérieure de la crise. Ni plus ni moins que Fillon qui, au contraire, affirme : « La crise sera une crise longue, ce sera une crise dure. » Le problème des travailleurs n'est pas de spéculer sur la durée de la crise d'une économie imprévisible même pour ses profiteurs. Il est d'empêcher que la classe capitaliste et le gouvernement n'en fassent payer le prix aux classes populaires.
Il faut empêcher le patronat de compenser le recul de ses marchés par les licenciements. Il n'y a aucune raison, à part l'intérêt de classe de la bourgeoisie, qu'une entreprise qui vend moins licencie une partie de ses travailleurs. Ce n'est pas aux travailleurs, à leurs salaires, à leur emploi, c'est-à-dire à leur droit à la vie, de servir de « variable d'ajustement » par rapport aux fluctuations du marché. Il faut imposer la répartition du travail entre tous sans diminution de salaire. Et pour financer cela, il faut prendre sur les profits présents ou passés. C'est là encore qu'on peut trouver l'argent pour les augmentations de salaire indispensables.
C'est impossible en période de crise, répètent tous les commentateurs dévoués aux riches. Mais ce n'est impossible que si l'on décrète qu'il ne faut toucher ni aux profits ni aux dividendes des actionnaires.
La classe capitaliste ne cédera pas de son plein gré. Il n'y a qu'à voir comment les patrons de Guadeloupe et de Martinique se battent bec et ongles pour éviter de payer les 200 euros d'augmentation revendiqués par la grève générale. Si, en Martinique, la grève continue car l'accord n'a pas été obtenu, en Guadeloupe, elle continue pour en imposer l'application.
Ce qui se passe aux Antilles ne peut pas se faire ici, affirment les bonnes âmes. Mais, ici aussi, en métropole, les seules fois où les travailleurs ont fait reculer le patronat et le gouvernement, c'est lorsqu'ils se sont lancés en grève générale, en 1936 et en 1968.
Alors, il faut, bien sûr, tout faire pour que la journée de grève et de manifestations du 19 mars, appelée par les syndicats, soit un succès. Mais il est plus important encore qu'elle soit suivie par d'autres journées de mobilisation jusqu'à ce qu'elles confluent dans la grève générale jusqu'à satisfaction.
Arlette LAGUILLER