La Réunion: une mobilisation moindre, mais une situation tendue
De multiples incidents se sont produits mardi à Saint-Denis-de-la-Réunion lors de la deuxième journée de grève générale organisée sur l'île par le Collectif des organisations syndicales, politiques et associatives de La Réunion (COSPAR). Malgré une mobilisation inférieure à celle du 5 mars, le ton s'est nettement durci.
Alors qu'ils étaient au moins 15.000 à défiler le 5 mars dernier, le mouvement contre la vie chère a rassemblé, selon la préfecture, 3.300 manifestants à Saint-Denis et 2.300 à Saint-Pierre (sud). Le COSPAR annonce de son côté des chiffres doubles.
A la mi-journée, depuis la place Mahé-de-Labourdonnais, Ivan Hoarau, secrétaire général de la CGTR et porte-parole du COSPAR, a appelé à "accroître la mobilisation" et à lancer de nouvelles opérations coup de poing, "non pas pour casser" mais pour peser sur les négociations ouvertes il y a quatre jours. "Il faut obliger le patronat à travailler sérieusement (...) Il tente de pourrir la situation", a-t-il lancé vers la foule avant de prendre la défense des petits commerçants "saignés par la grande distribution et les gros importateurs".
Le message n'a pas été entendu ainsi. Peu après cette intervention, une poignée de jeunes, tentant d'ériger une barricade, s'en est pris aux forces de l'ordre postées devant la préfecture. Celles-ci ont immédiatement riposté aux jets de galets et de bouteilles. Une grenade assourdissante puis une grenade lacrymogène ont dispersé la foule vers le centre-ville. Dans la confusion, des poubelles et deux voitures ont été incendiées, un commerce a été pillé et une femme a été blessée après avoir été renversée par un véhicule.
Le noyau dur des grévistes s'est ensuite déplacé vers l'est du chef-lieu, en direction du quartier populaire du Chaudron, où la tension a monté d'un cran. Sur leur passage, des émeutiers ont dégradé un radar et brisé la vitrine d'un supermarché. Pour éviter un embrasement, Jean-Hugues Ratenon, un des porte-parole du COSPAR, est intervenu sur Radio Freedom en fin d'après-midi pour appeler au calme. "Je déplore ce qui arrive", a-t-il déclaré, "mais il faut regarder les choses en face: il y a un vrai malaise social dans ce pays". Néanmoins, la situation reste tendue en soirée dans ce quartier.
A Saint-Pierre, les manifestants ont également bloqué l'entrée des grandes surfaces. Dans l'ouest, les dockers ont bloqué la commune du Port.
Un premier bilan provisoire fait état de 16 interpellations, dont quatre pour agression. Du côté de la police, le commissariat de Saint-Denis fait état d'au moins cinq blessés.
Cette nouvelle journée d'action survient alors que les négociations avec le patronat et l'Etat, entamées voici quatre jours, ont permis quelques avancées sur les quatre mesures d'urgence sociale revendiquée par le COSPAR. Le préfet de la Réunion, Pierre-Henry Maccioni, a par ailleurs annoncé une baisse du prix des carburants (-4 centimes sur le litre de sans plomb et -6 centimes sur le litre de gazole) et de la bouteille de gaz (-3 euros).
De son côté, le président du MEDEF réunionnais, François Caillé, a annoncé "une avancée significative" sur la hausse des salaires, le patronat acceptant le principe d'une augmentation mensuelle de 50 euros sous forme de prime. Mais il ne s'agit là que d'avancées timides, a jugé le COSPAR qui n'appelle toutefois plus à la grève générale reconductible.
En dépit des violences, les négociations doivent reprendre mercredi dans la matinée. AP